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  • Photo du rédacteurChristelle Chanut

Le décloisonnement de l’environnement, vecteur de convergence

Après le client, l’environnement est le deuxième facteur externe qui influence la transformation des assurances et des banques. Un cadre dans lequel les barrières s'amenuisent peu à peu, suscite en effet des opportunités dans un marché jusqu’à présent en partie protégé par la réglementation et la complexité intrinsèque des métiers.



Une réponse globale à un besoin qui s’affranchit de la nature du fournisseur


Le consommateur cherche avant tout une réponse à un besoin, pour laquelle la nature du fournisseur est secondaire : on peut citer en exemple le cas des paiements, où le client pourra choisir de passer par sa banque (paiement par carte bancaire réelle ou virtuelle), par une plateforme telle que PayPal ou par un dispositif tel que ApplePay. Demain, les sphères seront de plus en plus entremêlées, les GAFA pénétrant encore davantage le domaine des banques et des assurances qui devront irrémédiablement proposer des services innovants (nous y reviendrons dans un prochain article). Déjà habitué à une telle cohabitation des mondes, le client opérera de moins en moins fréquemment la distinction entre les acteurs et s’adressera à celui qu’il préfère, que ce soit parce que le mode d’interaction lui convient davantage, parce que le service est plus rapide ou de meilleure qualité ou pour toute autre raison.


Une convergence technologique avec les autres secteurs


Sur le plan technologique aussi, on assiste à un décloisonnement de l’environnement. Analyse de données, intelligence artificielle, et surtout Internet des objets (IoT) ne peuvent pas être imaginés dans le seul cadre de l’assurance ou de la banque.


L’utilisation bientôt massive de l’intelligence artificielle, notamment par le biais des assistants vocaux connectés, conçus par les GAFA, à laquelle assurances et banques contribueraient, entre autres, en est une bonne illustration.


Imaginons par exemple la situation suivante : un matin d’hiver, alors que les routes sont envahies par le verglas, l’assistant vocal de Paul, connecté à son agenda sur lequel aucune réunion n’est prévue ce jour-là, suggère à Paul de rester travailler à son domicile ; les modèles développés par sa compagnie d’assurance qui gère ses contrats auto et santé ont auparavant analysé le risque d’accident de la circulation et de chute sur le perron de sa maison. Paul accepte la recommandation sur l’application associée sur son téléphone mobile ; un SMS est envoyé à son chef pour le prévenir. Grâce à sa carte bancaire dont les coordonnées sont enregistrées, un déjeuner peut être commandé et Paul n’a plus qu’à indiquer ses préférences en termes de menu (parmi une présélection adaptée aux recommandations des nutritionnistes et à ses habitudes de consommation) et choisir une heure de livraison. 12h30, parfait : la journée peut commencer.


De nouveaux modèles économiques vertueux

Simplification des processus à l’extrême, gamme de produits restreinte, faibles coûts de structure, interaction client basée sur un canal unique (la plupart du temps une application mobile) : voilà ce qui caractérise les nouveaux entrants, néobanques, fintech, assurtech. Ces structures, souvent des start-ups de quelques dizaines de collaborateurs, n’entendent pas proposer toute la gamme des produits d’assurance ou de banque (et ne le peuvent d’ailleurs pas pour des raisons d’agrément), mais sont spécialisées dans un segment restreint sur lequel elles se distinguent des acteurs traditionnels par l’innovation dans l’interaction client (app mobile conviviale, codes de communication jeunes et informels, parfois décalés), et par l’excellence de l’exécution. Une structure de coûts réduite au minimum (pas de réseau physique, faible masse salariale, degré élevé d’automatisation…) assure la viabilité de ce modèle.


Une complémentarité, non une redondance, entre les acteurs

Assurances et banques traditionnelles, start-ups, GAFA : l’écosystème est riche de modèles différents, qu’il serait facile d’opposer. En réalité, ces acteurs sont essentiellement complémentaires.


L’émergence des GAFA dans le secteur de l’assurance et de la banque est perçue comme une menace par nombre d’acteurs traditionnels, sans doute à juste titre. Si nous n’allons pas détailler ici l’ensemble des points sur lesquels une concurrence peut se mettre en place, des synergies pourraient résulter de l’exploitation des données client au service de l’amélioration de la connaissance client ou de la personnalisation de produits et services ; la question de qui détient les données deviendrait alors secondaire.


Assurances et banques traditionnelles pourront ainsi s’appuyer sur des intervenants hyperspécialisés (car on ne peut pas être expert de tout), excellents dans l’exécution d’un nombre restreint de processus et services, disposant ainsi d’une opportunité de se concentrer sur la relation client. En effet, les acteurs traditionnels seront toujours les mieux placés pour répondre aux besoins du client de bout en bout, car ils en disposent d’une vision globale.


Un exemple emblématique de décloisonnement : l’open banking


Le développement de l’open banking, réalité depuis 2018 en Europe (*) mais encore à un stade embryonnaire à ce jour, est peut-être la manifestation la plus évidente de ce décloisonnement. Avec l’open banking, les données bancaires peuvent circuler hors de la sphère de la banque pour être utilisées par d’autres intervenants de l’écosystème bancaire et financier, ce qui facilite le développement de start-ups spécialisées dans la fourniture d’un produit, service ou processus particulier. Celles-ci interagissent avec les banques au moyen d’API mises à leur disposition.


Aujourd’hui, l’open banking reste toutefois limité à des fonctionnalités basiques, pas si innovantes que cela : catégorisation des dépenses, agrégateurs aux fonctionnalités étendues (crédits en plus des comptes, accessibles depuis l’app mobile et pas seulement le site web…), exécution de paiements à partir de comptes détenus dans plusieurs banques…


Ma conviction est que, à mesure que davantage de banques deviennent “ouvertes”, l’open banking devrait rapidement évoluer vers des fonctionnalités à plus forte valeur ajoutée ; par exemple, dans le domaine de la gestion de patrimoine, la capacité à définir un plan d’investissement en adéquation avec la situation du client (âge, situation de vie, projets…), à permettre au client de bénéficier d’analyses de données et de conseils d’experts lui permettant d’effectuer les bons arbitrages au bon moment, sera une avancée majeure.


La sécurité des données personnelles est bien sûr un élément indispensable au bon fonctionnement d’un tel dispositif. Passé l’investissement nécessaire pour garantir cette sécurité et ainsi rassurer le client et l’ensemble des acteurs de la chaîne, l’open banking constitue une opportunité majeure au service de l’enrichissement de l’expérience client. Ainsi l’intervention d’acteurs externes à la banque permettra-t-elle à celle-ci d’affirmer plus que jamais sa légitimité et sa valeur ajoutée dans le service qu’elle offre à ses clients.

(*) par l’entrée en vigueur de la deuxième Directive européenne des services de paiements (DSP2)


En conclusion, à l’instar du besoin du client qui est global et non cloisonné, les services proposés pour y répondre dépassent le strict cadre de la compagnie d’assurances ou de la banque. L’émergence de nouveaux acteurs ainsi que l’utilisation de technologies communes à l’ensemble des secteurs facilitent ce phénomène. Pourtant, loin de se diluer dans un écosystème qu’ils ne contrôleraient pas, les acteurs traditionnels doivent y voir une opportunité de renforcer leur légitimité en tant que point d’entrée privilégié du client, présent pour couvrir l’ensemble de ses besoins, dont la proposition de valeur vient s’enrichir pour certains produits et services de l’expertise d’acteurs spécialisés et agiles.

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