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  • Photo du rédacteurChristelle Chanut

La marketplace est-elle l’avenir de l’assurance ?


Marketplace : place de marché. Issu de la grande distribution (Amazon notamment), le concept de marketplace est de plus en plus communément utilisé dans l’univers des services financiers, en particulier de l’assurance. Mais de quoi s’agit-il exactement ? Ma définition est la suivante : la marketplace est un dispositif (ou plateforme, appelez-le comme vous préférez) de vente en ligne de produits d’assurance par un distributeur (n’étant ni assureur ni courtier) en complément de son offre principale. C’est ainsi que nous l’entendrons dans cet article.


Crédit photo : Geoff Greenwood / Unsplash



La marketplace réinvente la distribution de l’assurance à l’ère du digital


Le modèle de la marketplace n’est finalement pas si nouveau. Dans le monde “non digital”, la distribution de crédit à la consommation sur le lieu de vente par des acteurs spécialisés du crédit, appartenant ou non aux distributeurs (ex : Cofinoga, Sofinco, DIAC Renault), est une réalité depuis bien longtemps.


A l’ère du digital, ce modèle se développe et s’étend à d’autres secteurs, notamment à l’assurance, proposée systématiquement dans le processus d’achat en ligne de certains produits ou services (ex : assurance voyage, assurance annulation à l’achat d’une place de spectacle, assurance de matériel informatique…)


Il facilite en outre la réponse aux besoins des consommateurs dans leur globalité. A l’heure de l’émancipation du client et du décloisonnement de l’environnement, le consommateur se soucie moins de qui répond à son besoin que de la réponse qui y est apportée.


La marketplace stimule l’innovation produit


La marketplace constitue un relais de croissance pour l’assurance en accompagnant l’innovation d’un vaste ensemble de secteurs, notamment du transport ; innovation dans laquelle l’assurance a toute sa place. On peut citer les exemples du covoiturage (ex : Blablacar), des scooters partagés (ex : Cityscoot), ou encore des trottinettes électriques, de nouveaux usages auxquels les produits d’assurance préexistants ne s’appliquent pas, ou de façon partielle, et qui nécessitent donc la création d’offres d’assurances spécifiques.


Peut-être connaissez-vous Qover, une assurtech belge se définissant comme la marketplace de l’assurance innovante. Qover conçoit des produits d’assurance répondant à ces nouveaux besoins, en partenariat avec les fournisseurs de ces services et avec les assureurs. Les domaines sont variés et concernent aussi bien les services innovants (ex : assurance dommages et responsabilité civile pour les livreurs Deliveroo) que ceux préexistants et dont la distribution se digitalise (ex : assurance loyer impayé, assurance voyage…) Qover propose notamment une assurance pour les propriétaires désireux de louer leur bien immobilier, via la plateforme d’annonces immobilières Immoweb (l’équivalent belge de Se Loger en France). Ce partenariat s’insère dans la stratégie d’Immoweb de devenir le “one-stop shop” (*) du marché immobilier belge, en proposant également des documents spécialisés et des simulations de crédit. La marketplace renforce ainsi l’offre de valeur en répondant à un maximum de besoins des clients autour de son activité, l’immobilier.


Qover développe par ailleurs une offre sur étagère qu’elle propose aux fournisseurs de marketplaces digitales : un modèle industrialisé, efficace, aux coûts maîtrisés.


(*) source : Qover


Quelle place pour les assureurs traditionnels ?


Si nombre de produits, notamment les plus innovants, offerts par les marketplaces, n’ont pas d’équivalent dans les circuits traditionnels, l’inverse n’est pas vrai et l’exemple de Qover montre que même dans les secteurs pour lesquels l’acte d’achat est le moins digitalisé (exemple-type, l’immobilier), la marketplace prend tout son sens. On peut donc s’interroger à juste titre sur la pérennité des modes de distribution traditionnels de l’assurance (assureur en direct, réseau d’agents généraux, courtiers multimarques…)


Il peut sembler difficile de tirer des enseignements sur le fonctionnement du marché actuel et d’avoir une réponse précise à cette question.

Les assureurs traditionnels gardent toute leur place dans la conception des offres. Qover n’est pas un assureur et a besoin de s’appuyer sur le savoir-faire de compagnies établies, qu’il s’agisse de start-up ou de grands groupes. Vous pourrez me rétorquer que La Parisienne Assurances dispose d’un modèle de conception d’offres innovantes ressemblant à celui de Qover, et est en plus un assureur ; plusieurs offres conçues par Qover l’ont d’ailleurs été avec La Parisienne.

Allons-nous vers une séparation des activités de distribution et de production, ces dernières restant dévolues aux assureurs tandis que la distribution serait profondément transformée ? Possible, mais j’ai là encore un contre-exemple à vous soumettre : BlaBlaCar, le leader du covoiturage, avait historiquement un partenariat avec Axa, or il a fini par créer BlaBlaSure, nouvel assureur immatriculé à l’ORIAS.


En réalité, les deux modes de distribution obéissent à des logiques différentes et à des usages distincts. Le point d’entrée est tantôt le besoin de compléter par une assurance un produit ou service concomitamment à son acquisition, tantôt le besoin d’assurance sans connexion directe au produit associé. Si rien ne les empêche d’envisager des partenariats avec des distributeurs en ligne, tirant ainsi parti du potentiel de la marketplace (la dimension “production” vs la distribution), le réel enjeu pour les assureurs traditionnels est aujourd’hui d’aller chercher le consommateur là où il est plutôt qu’attendre dans une posture passive qu’il franchisse la porte de son agence. Pour y parvenir, ils pourront s’appuyer sur 3 éléments principaux :

  • les outils, en particulier le CRM et la data : la quasi-totalité de la population est aujourd’hui assurée chez les assureurs “traditionnels” ; les données dont ceux-ci disposent sont donc considérables, et l’avantage concurrentiel réel pour qui sait les exploiter

  • la communication au service de l’innovation : une communication adaptée, mettant en avant une image moderne et innovante, est nécessaire pour accompagner le mouvement du monde et continuer notamment à séduire les clients les plus technophiles ; elle doit être le complément de partenariats à mettre en place avec des assurtech pour dynamiser l’innovation dans la conception des produits et l’interaction avec les clients

  • le renforcement de la dimension conseil : la dimension conseil est absente de la marketplace qui privilégie la facilité et la rapidité de souscription ; or, comment le consommateur peut-il savoir si le produit qu’on lui propose est bien le meilleur pour lui ? une dimension à ne pas négliger pour l’agent d’assurances, et encore davantage pour le courtier, à même d’offrir à son client le conseil qu’il peut attendre


Notre conclusion est, pour une fois, sans appel : oui, la marketplace est bien l’avenir de l’assurance, aussi bien parce qu’elle est l’aboutissement d’un mode de distribution adapté à la digitalisation de l’économie (et des habitudes des consommateurs) que parce qu’elle permet la conception et l’individualisation des offres selon les usages et les besoins des consommateurs.

Mais cela ne signifie pas que l’assurance n’a pas d’avenir en-dehors de la marketplace, loin de là. Aux circuits traditionnels de se réinventer pour prouver qu’ils ont encore toute leur légitimité. Ils en ont les moyens ; en ont-ils la volonté ?


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