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  • Photo du rédacteurChristelle Chanut

Et si l’ubérisation des services financiers était finalement bénéfique à tous ?


Né en 2014, le concept d’ubérisation s’est progressivement imposé pour désigner l’arrivée en masse de nouveaux entrants sur des secteurs toujours plus nombreux de l’économie, où, soumis à des règles et à des contraintes plus souples que les acteurs “historiques”, ils concurrencent ceux-ci de manière frontale jusqu’à mettre en péril leur pérennité.


Dans l’assurance et dans la banque, ce phénomène est illustré par le développement des fintech, assurtech et les incursions des GAFA, dont le périmètre, aujourd’hui encore limité, est susceptible de s’élargir substantiellement dans les années à venir.


Au-delà d’une apparente concurrence, une complémentarité ne peut-elle pas émerger entre ces deux mondes ?



Les nouveaux entrants ne concurrencent pas les acteurs traditionnels sur l’ensemble de la chaîne de valeur


Acteurs hyperspécialisés, les assurtech et fintech, et pour le moment les GAFA, ne sont pas présents sur l’ensemble de la chaîne de valeur ; très loin de là. Portés par de faibles coûts de structure, ils bénéficient d’une forte agilité interne et de processus fortement automatisés, gages de performance au service d’image jeune, dynamique et innovante. Autant d’atouts qui leur permettent d’exceller sur le segment qu’ils occupent.


Le manque de diversification des activités apparaît en revanche comme la principale limite de ces modèles. On imagine mal par exemple des néobanques, dont la condition de succès réside en la quasi-absence de gestion de risque, proposer des crédits à leurs clients. L’analyse d’autres exemples dans un article précédent mène à la même conclusion.


Si elles sont challengées par des nouveaux entrants sur des points très précis de la chaîne de valeur, les assurances et les banques traditionnelles sont ainsi les seules à disposer d’une vision d’ensemble des besoins de leurs clients et à y répondre dans leur globalité.


Une opportunité de se transformer et de gagner en agilité


Comme nous le savons, toute menace est génératrice d’opportunités.


Il y a une dizaine d’années, la réponse des grands groupes à l’arrivée d’acteurs en ligne a été de lancer leurs propres assurances ou banques en ligne (Hello Bank, BforBank, Amaguiz…) : ces nouveaux venus répondaient à un besoin réel de la clientèle qui était encore peu ou mal couvert par les acteurs traditionnels. Cette réaction n’est pas transposable à la situation actuelle et future où la forte agilité voire le leadership technologique de bon nombre de nouveaux entrants rend difficilement envisageable la création d’entités similaires par les grands groupes ; la coopération s’impose donc.


L’organisation de rencontres (à l’image de French Assurtech, fondée par des mutuelles) montre d’ailleurs l’appétence des assurances et des banques traditionnelles pour la collaboration avec les start-up. D’après une étude CapGemini de 2019, les assureurs attendent principalement de la collaboration avec les assurtech la capacité de développer de nouvelles offres, d’améliorer leur expérience client et de compléter leurs processus métier (3 bénéfices plébiscités par 79% à 84% des personnes interrogées) ; en revanche, la sécurisation des données est le bénéfice le moins attendu, citée par seulement 10% des répondants.


De nouveaux horizons profitables à tous


L’innovation apportée par les fintech / assurtech n’est pas seulement technologique ou limitée à un nombre restreint de produits et services. Elle prend aussi la forme d’offres inédites composées autour de leur coeur de métier auquel sont adjoints un ensemble de services cohérents et porteurs de valeur : un segment jusqu’ici inexploré par les assurances et banques traditionnelles.


Deux exemples :

  • Dans le contexte actuel du coronavirus, l’assurtech Alan, spécialisée dans l’assurance santé, propose un ensemble de services inédits autour de son offre de couverture santé : contenu détaillé et mis à jour sur la situation sanitaire, questionnaire d’évaluation de risque et recommandations personnalisées, remboursement sans ordonnance des médicaments à base de paracétamol, télémédecine, application de méditation.

  • Dans la gestion de patrimoine / gestion de fortune, l’arrivée sur le marché de fintech offrant, outre des tarifs attractifs, des capacités avancées de conseil accessibles à partir d’un montant minimum faible (300€ pour certaines), a eu pour effet de démocratiser l’accès à des services auparavant réservés aux clients les plus fortunés ; cette révolution a été permise par le recours à des robot-advisors, moins coûteux que des conseillers humains et capables de gérer un volume massif de flux. En explorant ainsi un segment de marché non encore occupé, ces fintech répondent à un besoin jusque-là non couvert. Les grands groupes ne s’y trompent pas : ainsi la start-up WeSave a-t-elle été rachetée par Amundi l’année dernière, tandis que Grisbee, une autre jeune pousse innovante, a décidé de développer son offre B2B, en annonçant des partenariats à venir avec plusieurs grandes banques et institutions financières qui utiliseront la plateforme pour leurs clients. Un pas décisif vers la complémentarité ?


En conclusion, l’avenir n’est pas à la confrontation entre les modèles, mais à la collaboration. Complémentaires des acteurs traditionnels, seuls capables d’offrir une réponse globale aux besoins des clients, les start-up ont toute leur place sur le marché par l’excellence qu’elles apportent aux processus qu’elles investissent. Une coopération fructueuse permettrait aux assurances et aux banques “historiques” de renforcer leur légitimité au service du client, en tirant parti du meilleur des innovations permises par les nouveaux entrants.

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